Un Homme A Poil Sur Le Net

30 03 2010

D’un terrorisme à l’autre

Filed under: C'est la vie...,Paradoxal système,Réflexions — Un Homme @ 10:18

Après les sanglants attentats de Moscou (une quarantaine de morts dans le métro moscovite) déjà attribués, bien qu’aucun groupe ne les ai revendiqués, aux “rebelles du Caucase”, la réaction des autorités était des plus prévisibles.

Ainsi, le président russe, Dmitri Medvedev, pour qui l’attentat est l’oeuvre de “bêtes sauvages”, a-t-il immédiatement déclaré: “La politique de la répression de la terreur et de la lutte contre le terrorisme va se poursuivre. Nous allons poursuivre les opérations contre les terroristes sans compromis et jusqu’au bout”. Le premier ministre, Vladimir Poutine, habitué lui à une rhétorique encore plus martiale ((vous vous souvenez qu’il voulait “buter les terroristes jusque dans les chiottes”?)), a promis que les “terroristes” seraient “anéantis”.

La réaction états-unienne était, elle aussi, prévisible. La secrétaire d’Etat, Hillary Clinton ((qui, pour mémoire, était favorable à l’invasion de l’Irak en 2003.)) a donc affirmé: “Que l’on soit dans le métro de Moscou, le métro de Londres, un train à Madrid ou un immeuble de bureaux à New York, nous faisons face au même ennemi”.

Caucase, Afghanistan, Gaza, même combat?

La suite, on l’imagine très bien. Jouant sur le légitime sentiment d’horreur qu’inspire ce genre d’attentat, les autorités ne tarderont pas à “renforcer les mesures de sécurité” ((qui sont, presque par definition, inefficaces pour garantir la sécurité. Sur la notion de “sécurité” lire par exemple: La « sécurité » : une notion très malléable.)) qui se transformeront rapidement en une augmentation de la discrimination envers les groupes fournissant les usual suspects ((donc, caucasiens pour la Russie, musulmans sous nos latitudes, voire plus généralement les noirs et arabes, dont chacun sait bien qu’ils constituent les hordes de trafiquants aux portes de nos belles cités.)).

Bien sûr, dans l’ensemble du discours sécuritaire, il est essentiel de taire la cause de ces actes barbares. Après tout, des “bêtes sauvages” ne sauraient avoir d’autre motivation que la haine de l’Occident.

Pourtant, comme le note très justement l’article de l’AFP ((sur lequel sont calcés tous les autres… merveille de la diversité de la presse “libre”.)) “ces attentats […] interviennent alors que les forces russes ont multiplié ces derniers mois les opérations contre les rebelles du Caucase, tuant notamment en mars deux de leurs leaders“.

Ainsi, l’horreur à Moscou pourrait être comprise comme un épisode de la guerre brutale que mène l’empire russe dans le Caucase ((à noter que les attentats de Moscou semblaient viser, symboliquement, le siège du FSB (ex-KGB) et le ministère de l’Intérieur.)).

De même, à Bruxelles se déroule actuellement le procès “sous haute surveillance” ((évidemment! Comment pourrait-on maintenir la ménagère belge dans la peur autrement…)) de “la filière belge d’Al Qaeda”. Où l’on reproche principalement aux inculpés d’organiser l’envoi de combattants en Afghanistan ((contre les occupants occidentaux hein, pas pour piloter les F-16 évidemment…)); mais on ne revient pas beaucoup sur le fait que cette “filière” (et donc ce procès) n’auraient eu aucune raison d’être si les américains et leurs vassaux n’avaient envahis l’Afghanistan en 2001.

Dernier exemple, celui d’un kamikaze jordanien qui s’est fait exploser dans une base de la CIA en Afghanistan. D’après son frère, il avait été profondément changé par l’attaque israélienne sur Gaza en janvier 2009, ce qui aurait pu le pousser dans les bras de l’islamisme radical façon Ben Laden…

Bref, face au cauchemar qui, parfois, surgit brutalement dans notre quotidien, nous ne devons jamais oublier l’horreur que nous faisons quotidiennement vivre à d’autres populations qui subissent le joug de notre impérialisme. Nous restons la principale source du terrorisme dans le monde. Vouloir l’ignorer ou l’oublier nous condamne à ne traiter que les conséquences plutôt que de s’attaquer aux causes.

Pour paraphraser Noam Chomsky: il y a une solution facile pour réduire la menace du terrorisme, il suffit de cesser d’y participer.

27 03 2010

Le Spectacle, hier comme aujourd’hui…

Filed under: Aphorismes,Lectures,Réflexions — Un Homme @ 21:15

En lisant La Société du spectacle, écrit en 1967 par Guy Debord, on ne peut être que frappé par l’actualité de certaines thèses. Ainsi par exemple:

Dans ce développement complexe et terrible qui a emporté l’époque des luttes de classes vers de nouvelles conditions, le prolétariat des pays industriels a complètement perdu l’affirmation de sa perspective autonome et, en dernière analyse, ses illusions, mais non son être. Il n’est pas supprimé. Il demeure irréductiblement existant dans l’aliénation intensifiée du capitalisme moderne: il est l’immense majorité des travailleurs qui ont perdu tout pouvoir sur l’emploi de leur vie, et qui, dès qu’ils le savent, se redéfinissent comme le prolétariat, le négatif à l’oeuvre dans cette société. Ce prolétariat est objectivement renforcé par le mouvement de disparition de la paysannerie, comme par l’extension de la logique du travail en usine qui s’applique à une grande partie des “services” et des professions intellectuelles. C’est subjectivement que ce prolétariat est encore éloigné de sa conscience pratique de classe, non seulement chez les employés mais aussi chez les ouvriers qui n’ont encore découvert que l’impuissance et la mystification de la vieille politique. Cependant, quand le prolétariat découvre que sa propre force extériorisée concourt au renforcement permanent de la société capitaliste, non plus seulement sous la forme de son travail, mais aussi sous la forme des syndicats, des partis ou de la puissance étatique qu’il avait constitués pour s’émanciper, il découvre aussi par l’expérience historique concrète qu’il est la classe totalement ennemie de toute extériorisation figée et de toute spécialisation du pouvoir. Il porte la révolution qui ne peut rien laisser à l’extérieur d’elle-même, l’exigence de la domination permanente du présent sur le passé, et la critique totale de la séparation; et c’est cela dont il doit trouver la forme adéquate dans l’action. Aucune amélioration quantitative de sa misère, aucune illusion d’intégration hiérarchique, ne sont un remède durable à son insatisfaction, car le prolétariat ne peut se reconnaître véridiquement dans un tort particulier qu’il aurait subi ni donc dans la réparation d’un tort particulier, ni d’un grand nombre de ces torts, mais seulement dans le tort absolu d’être rejeté en marge de la vie.

Guy Debord, La Société du Spectacle, 1967, thèse 114

à méditer, longuement… ;)

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