(les citations sont extraites de cet article du Soir et de cet article de La Libre Belgique)
Ainsi donc, le Royaume serait la proie de menaces terroristes?
Une série de quinze perquisitions ordonnées par la juge d’instruction Isabelle Panou a abouti à l’interpellation de quatorze islamistes radicaux soupçonnés de préparer un attentat à Bruxelles. « Nous disposons d’éléments permettant de croire qu’un attentat pourrait être en cours de préparation dans le pays et à Bruxelles », a déclaré le Premier.
Ah! un attentat…
Et quels sont les éléments permettant d’envisager le risque d’un attentat?
« Tout part d’un projet d’évasion du terroriste Nizar Trabelsi, condamné en juin 2004 à une peine de dix ans de prison, commente Lieve Pellens, porte-parole du parquet fédéral. Nous avons obtenu des éléments faisant état de ce projet. Une enquête a été ouverte et a confirmé l’hypothèse selon laquelle l’entourage du condamné allait faire usage d’armes et d’explosifs pour le faire sortir de la prison de Lantin. »
[…]
« Si ces gens prônant l’islamisme radical sont prêts à faire usage d’explosifs et d’armes lourdes pour une évasion, ils doivent être capables de préparer un attentat »
Bref, on saute allègrement du coq à l’âne, d’un projet d’évasion à un projet d’attentat. On admire le sérieux du raisonnement…
Quoiqu’il en soit, il y aurait peut-être matière à risque si effectivement “ces gens” ((je laisse le soin à d’autres d’analyser la lourde connotation dans l’usage de “ces” plutôt que de “des”)) étaient en possession d’armes lourdes et d’explosifs ((cette possession est répréhensible sans avoir recours à une législation anti-terroriste; mais dans le cas de cette dernière, les peines sont renforcées comme je l’ai déjà signalé)). Mais là non plus, rien.
Au cours de l’opération policière de vendredi, 15 perquisitions ont été menées, débouchant sur des saisies de documents et de matériel informatique. Ni armes ni explosifs n’ont été trouvés.
Bref, rien, aucun élément permettant d’étayer la thèse d’un projet d’évasion et donc encore moins celle d’un risque d’attentat. D’ailleurs, tous les suspects ont été relâchés.
L’enquête se poursuit néanmoins, a précisé Lieve Pellens, porte-parole du parquet fédéral. “Il existait suffisamment d’indices d’existence d’une menace terroriste, raison pour laquelle nous n’avons pas hésité à faire appréhender les suspects”, a-t-elle indiqué. Selon elle, l’absence de mandats d’arrêt et la relaxe générale ne constituent pas une surprise. Les conditions (cumulatives) qui justifient la délivrance d’un mandat d’arrêt n’étaient, semble-t-il pas, réunies, a précisé Mme Pellens,
Malgré l’absence totale d’éléments matériels permettant de constater l’existence d’une menace terroriste; les mesures de sécuritées renforcées restent d’application.
“Il n’y a aucune raison de lever ces mesures qui restent d’application jusqu’au 2 janvier”, a indiqué Jaak Raes, directeur général de la cellule de crise du ministère de l’Intérieur.
(on admire la logique qui demande que l’on donne des raisons pour sortir des mesures d’exception alors qu’il semblerait plus sensé de demander les raisons qui expliquent qu’elles restent d’application)
Ces mesures résultent d’un avis de l’OCAM (Organe de Coordination pour l’Analyse de la Menace):
« [L’Ocam] nous a dit que le risque nécessite des mesures administratives dans les lieux très fréquentés. Donc, à Bruxelles, une présence policière sera accrue dans le métro, au marché de Noël, sur la Grand-Place et partout où la foule se rassemble. Des mesures similaires à celles prises lors d’un sommet européen. D’autres plus discrètes sont aussi décidées. »
Néanmoins, un expert relativise. « Cette enquête est purement judiciaire et part d’un projet d’évasion. Il n’y est pas question de projet international comme c’est le cas habituellement. Si menace il y a, elle est générale et non précisée. »
Un avis partagé par Luc Verheyden, de l’Ocam. « Le déploiement des forces de police est dû à une conjonction d’éléments. D’un côté, il y a la tentative d’évasion et de l’autre les menaces internationales notamment lancées par Al-Qaïda dernièrement contre l’Europe. Rien de plus précis. »
Mais qu’est-ce que l’Ocam? L’Ocam a été créé lors du conseil des ministres du 25 mars 2005. On peut en trouver une description sur le portail fédéral. On y lit ceci:
Cet organe a pour objectif : 1° de développer un échange d’informations cohérent et structuré entre tous les partenaires concernés par la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme ; 2° d’aboutir à des analyses communes de la menace fondée sur cet échange d’informations.
[…]
Dans une première phase, ces analyses se focaliseront sur la menace terroriste et extrémiste mais elles pourront être étendues à d’autres menaces.
D’autres menaces? Lesquelles?
Nous le saurons sans doute quand le gouvernement aura trouvé une autre menace pour nous maintenir dans la peur…